Prévenir les maux des intervenants

Boite à outils
Écrit par Maude Fortier, Criminologue

Lorsque l’on choisit la voie de l’intervention sociale, c’est souvent par passion de l’humain, par volonté de comprendre sa complexité et de l’aider. On nourrit notre flamme chaque fois que l’on sent faire une différence dans la vie d’un usager.

Dans le bagage socio-culturel des intervenants sociaux, on retrouve la notion de “vocation” comme point central. Se commettre totalement pour une cause, incarner un rôle d’aidant et y dédier toute sa vie.

On vit alors avec une certaine pression de tout donner de soi, sans rien demander en retour, d’avoir comme “paie” la satisfaction d’avoir aidé l’autre. Penser à soi et à son bien-être est donc à contre-courant de la culture de l’intervenant social.

Les inconforts, la fatigue, la lourdeur, l’impuissance, les frustrations, l’envahissement et le stress peuvent donc s’installer tranquillement en nous, au fil des semaines, des mois, des années, sans que l’on prenne cela trop au sérieux. On banalise, on rationalise, on justifie : “Ah, c’est normal, tout le monde est fatigué. La fin de semaine arrive, je vais pouvoir me reposer.”, “Ma clientèle vit des choses bien pires que moi, je n’ai pas à me plaindre.”, “C’est un bout plus difficile à cause de : raison X-Y-Z, c’est tout. Ça va passer”.

Or, ne serait-ce que par la nature même de notre travail, d’être confronté aux difficultés psychologiques et sociales de la population, aux lacunes du système, à la misère et la détresse humaine, nous, intervenants, sommes particulièrement à risque de vivre des maux tels que :+ Fatigue de compassion;+ Épuisement professionnel; + Trauma (vicariant ou non); + Anxiété;+ Déséquilibre entre la vie personnelle et professionnelle;+ Etc.

Pourtant, à l’exception des programmes d’aide aux employés pour les employés du réseau et de quelques initiatives indépendantes d’organismes communautaires, il n’existe pas de structure complète et définie pour venir en soutien rapidement aux intervenants sociaux.

En attendant, comment faire pour prendre soin de nous et prévenir les risques de vivre un de ces maux ? Voici quelques pistes :

01. Reconnaître les facteurs de risque qui s’appliquent à nous comme intervenant et se donner le droit de vivre des difficultés avec notre santé mentale;

02. S’informer sur les signes et les symptômes;

03. S’observer sur une base régulière. Exemple : S’arrêter cinq minutes chaque semaine pour prendre le pouls de notre état physique, mental et émotionnel : “Comment je vais réellement” ? ”Quelles émotions et pensées m’habitent en ce moment même” ? ” Comment je me sens dans mon corps ?”;

04. Adopter un discours bienveillant envers nous-mêmes, par exemple, se rappeler que nous donnons déjà beaucoup de nous tous les jours pour aider les autres, que nous sommes nous aussi des humains et que c’est impossible d’être toujours à 100 % de notre énergie;

05. Développer un espace ou une période tampon entre le travail et la vie personnelle pour aider à créer la coupure (ex. : musique instrumentale dans la voiture pour laisser aller son flot de pensées, prendre une douche et changer de vêtements en arrivant à la maison, méditer, etc.;

06. Investir dans sa vie personnelle, dans nos relations avec des gens qui nous font du bien, dans une passion qui n’est pas en lien avec l’aide à autrui (lecture de romans, arts, activités en nature), etc.;

07. Nourrir l’étincelle en se ramenant à ce qui nous fait vibrer dans notre travail d’intervenant : “Qu’est-ce qui m’a amené vers ce métier ?”, “Qu’est-ce qui m’y fait rester”, “Pourquoi je fais ce travail ?”. L’idée est d’essayer de toucher à cette étincelle au quotidien.

Vous êtes extraordinaires, votre travail est important et tout le monde gagne à ce que vous vouliez le faire pendant encore longtemps. Prenez soin de vous !