Le criminologue qui pratique dans un autre pays que celui où il a reçu sa formation

Comment la pratique et l’intervention en criminologie sont-elles transférables d’un pays à l’autre ou à l’intérieur du Canada ? Quelles sont les exigences pour un criminologue québécois qui veut pratiquer à l’étranger? À l’inverse, quelles sont celles en vigueur pour un criminologue de l’étranger qui souhaite exercer au Québec?

Voici quelques réponses à vos questions sur le sujet.

1. Criminologue québécois souhaitant pratiquer à l’étranger

Tout d’abord, le criminologue a l’obligation d’informer l’Ordre de son lieu d’exercice principal, c’est-à-dire son domicile professionnel et autres lieux d’exercice, de même que de tout changement dans les 30 jours, selon l’article 60 du Code des professions :

« 60. Tout professionnel doit élire domicile en faisant connaître au secrétaire de l’ordre dont il est membre le lieu où il exerce principalement sa profession dans les 30 jours où il commence à exercer celle-ci ou, s’il ne l’exerce pas, le lieu de sa résidence ou de son travail principal; le domicile ainsi élu constitue le domicile professionnel. Il doit aussi lui faire connaître tous les autres lieux où il exerce sa profession. Il doit également lui faire connaître une adresse de courrier électronique établie à son nom.

Il doit également aviser le secrétaire de tout changement à ce sujet, dans les 30 jours du changement. »

a) Avec des clients vivant à l’étranger

Le criminologue membre de l’OPCQ qui souhaite pratiquer à l’étranger doit répondre aux exigences de la province ou du pays où il pratique. Mis à part au Québec, il n’y a pas ailleurs au Canada d’exigences d’appartenance à un ordre professionnel pour porter le titre de criminologue.

Plusieurs pays ou régions du monde ont des ordres professionnels ou des associations régissant la profession de criminologue. La définition de ce qu’est un criminologue peut toutefois varier d’un pays à l’autre. Par exemple, aux États-Unis, il existe des associations professionnelles telles que l’American Society of Criminology (ASC) qui fournissent des directives et des normes pour l’exercice à titre de criminologue. Ces organisations règlementent la pratique professionnelle en fixant des normes de qualité et en faisant la promotion de l’éthique dans ladite profession.

Le criminologue qui souhaite pratiquer à l’étranger avec des clients non québécois doit s’assurer de répondre aux exigences du pays d’accueil pour pratiquer sa profession. S’il n’est à l’étranger que de façon temporaire et s’il continue d’assurer les services à des clients québécois, il doit maintenir son inscription au tableau de l’OPCQ.

b) Avec des clients vivant au Québec

La pandémie de 2020-2022 a contribué à accentuer l’utilisation des plateformes de visioconférence pour l’offre de services de la part des criminologues. Les choses ont beaucoup évolué depuis et, pour plusieurs intervenants du domaine psychosocial, il est désormais admis que bon nombre d’interventions peuvent se faire à distance. Un criminologue qui procure des services à partir de l’étranger à des clients au Québec est toujours soumis aux règles déontologiques et aux règlements de l’OPCQ, notamment sur la tenue de dossier. Il doit aussi s’assurer que ses moyens de communication avec ses clients sont sécuritaires et garantissent la confidentialité des échanges.

Le tableau suivant présente les obligations des criminologues voulant pratiquer à l’étranger de façon temporaire, avec des clients vivant au Québec ou des clients vivant à l’étranger. Évidemment, ces règles s’appliquent aux criminologues ayant une pratique privée. Pour ceux qui œuvrent au sein d’organismes institutionnels ou communautaires, ils doivent d’abord respecter les règles de leur employeur concernant le télétravail et la pratique à distance.

Le criminologue exerce à l’extérieur du Québec
Le client vit au QuébecLe client vit à l’extérieur du Québec
Le criminologue doit être inscrit au tableau de l’Ordre.Le criminologue a le choix de demeurer inscrit ou non au tableau de l’Ordre, notamment s’il souhaite rester au courant des affaires de l’Ordre et du développement de sa profession.
Le criminologue doit vérifier s’il a l’obligation d’obtenir un permis ou une autorisation légale d’exercer dans la juridiction où il se trouve, et ce, même s’il exerce uniquement à distance avec des clients vivant au Québec. Le criminologue doit satisfaire les exigences légales qui prévalent dans la juridiction où il se trouve.Le criminologue doit vérifier s’il a l’obligation d’obtenir un permis ou une autorisation légale d’exercer dans la juridiction où il se trouve, et ce, qu’il offre des services en personne ou à distance. Le cas échéant, le criminologue doit satisfaire les exigences légales qui prévalent dans la juridiction où il se trouve.
Le criminologue doit maintenir une couverture d’assurance conformément au règlement de l’OPCQ, c’est-à-dire adhérer au régime collectif d’assurance.Le criminologue doit s’assurer d’être couvert par un contrat d’assurance responsabilité professionnelle dans le lieu ou la juridiction où il exerce.
Le criminologue doit respecter l’ensemble des obligations relatives à l’exercice de sa profession, telles qu’inscrites au Code des professions (RLRQ, c. C-26) et de la réglementation qui en découle (Code de déontologie, règlement sur les dossiers, etc.) Il doit donc informer le client que l’OPCQ peut recevoir et traiter une plainte pour des services dispensés à distance, et ce, même si le criminologue n’était pas physiquement sur le territoire du Québec au moment où les services ont été rendus.Le criminologue peut être assujetti à des obligations et à une réglementation du lieu où il exerce.

Le criminologue qui souhaite s’établir à l’extérieur du Québec doit maintenir son inscription au tableau de l’Ordre s’il souhaite assurer le service à des clients québécois. En revanche, s’il ne s’adresse qu’à des clients vivant hors du Québec, il doit satisfaire les exigences du pays ou territoire où vivent ses clients et ne doit pas nécessairement maintenir son inscription à l’OPCQ.


2. Personnes provenant de l’étranger voulant pratiquer la criminologie au Québec

Les personnes de l’extérieur du Québec qui souhaitent devenir membres de l’OPCQ et ainsi porter le titre de criminologue au Québec et en exercer les responsabilités doivent adresser une demande d’admission à l’OPCQ. Leur demande sera étudiée à la lumière des normes d’équivalence. Ces normes permettent d’évaluer si la formation et l’expérience du candidat lui ont permis d’acquérir les connaissances et les compétences attendues d’un criminologue au Québec. Ils doivent aussi se conformer aux exigences linguistiques de l’Office québécois de la langue française.


La criminologie à travers le monde : transférabilité de la pratique

La criminologie est une discipline largement répandue à travers le monde, et de nombreux pays offrent des programmes d’étude en criminologie dans leurs universités et institutions de recherche. Ces programmes diffèrent les uns des autres selon s’ils sont davantage axés sur le droit, l’intervention psychosociale, la psychologie, les techniques policières ou la sociologie. Certains pays sont à l’avant-garde de la recherche et du développement des connaissances en criminologie.

Aux États-Unis, notamment, plusieurs universités et chercheurs contribuent activement au développement de la science criminologique. Également au Royaume-Uni, la criminologie est une discipline courante. De nombreuses institutions universitaires britanniques proposent des cursus de formation, et le pays est reconnu pour sa contribution majeure aux connaissances tout autant qu’aux pratiques.

L’Australie et la France sont aussi reconnues pour leur apport considérable à la criminologie. Dans plusieurs autres pays d’Europe et d’Amérique du Sud, divers programmes de formation sont offerts dans les universités. En bref, l’étude du phénomène criminel, de ses causes, de la prévention et des meilleures méthodes d’intervention relève d’un domaine scientifique très actif et effervescent.

Le Canada est à la pointe des découvertes scientifiques en criminologie. Plusieurs universités y offrent des programmes de formation et sont des terreaux très fertiles en matière de recherche. En l’occurrence, l’Université Simon Fraser en Colombie-Britannique, l’Université de Calgary, les universités de Toronto et d’Ottawa en Ontario, l’Université de Montréal et l’Université Laval au Québec, et l’Université de Moncton au Nouveau-Brunswick.

Par ailleurs, le Canada, plus particulièrement le Québec, compte sur l’existence du Centre international de criminologie comparée (CICC), né en 1969 d’un partenariat scientifique entre l’Université de Montréal et la Société internationale de criminologie. Le CICC s’est transformé en 2016 en centre interuniversitaire rattaché à la fois à l’Université de Montréal et à l’Université du Québec à Trois-Rivières.

« La mission du CICC consiste à rassembler des chercheurs désireux de comprendre, dans une perspective multidisciplinaire, les processus de régulation des comportements criminels, ainsi que les différentes modalités d’intervention déployées par les institutions publiques, privées et communautaires pour y faire face. Il est le seul au Québec à s’intéresser de façon globale aux phénomènes criminels, à leur contrôle et à la sécurité. »

Le Centre rassemble plusieurs dizaines de chercheurs provenant de différentes universités québécoises, d’un collège (cégep) et des représentants de divers organismes institutionnels ou communautaires intéressés par la criminologie. Il rassemble également plusieurs collaborateurs à l’étranger (Brésil, Chypre, États-Unis, France, Suisse, Italie, Espagne, Belgique, Royaume-Uni, Pays-Bas, Australie et Afrique du Sud) qui participent à ses études et à la diffusion des résultats.

Par ailleurs, l’Association internationale des criminologues de langue française (AICLF) a été fondée à Genève en 1987 par le professeur Denis SZABO, autrefois de l’Université de Montréal, dans le but de favoriser les relations entre universitaires, praticiens et chercheurs qui étudient le phénomène criminel ou travaillent en criminologie appliquée, leur trait d’union étant l’utilisation du français dans leurs échanges internationaux. Cette association contribue, tous domaines confondus, à la prévention du crime et à l’amélioration des méthodes pénales constituant ainsi un réseau francophone de la criminologie.

Ces nombreux échanges internationaux sur le sujet de la criminologie visent principalement la recherche et les échanges académiques. Mais qu’en est-il de la transférabilité des pratiques?